En 2005, Henri Boudreault, avec l’autorisation de l’auteur Luc Lamond, complète ce recueil. Il insère des pistes d’actions à être réalisées par les apprenants et celles à être mise en oeuvre par les enseignants pour favoriser au maximum l’émergence de la connaissance, pour chacune de ces 11 dispositions.
Le texte original d’André Giordan précise pour la seconde condition : « Pour apprendre, il faut que je me lâche! » Henri Boudreault l’a traduit dans le contexte québécois par : « Pour apprendre, il faut se laisser aller! ». Qu’en est-il? En quoi cette condition est-elle fondamentale? Qu’implique-t-elle chez les apprenants? Que fait l’enseignant pour la favoriser chez l’apprenant?
Qu’en est-il?
Apprendre est une action (activité) mentale nécessitant beaucoup d’énergie de la part de celui qui apprend et dont le résultat entraîne nécessairement un changement chez ce dernier. Un changement de la représentation qu’il se fait d’une réalité à partir de la perception d’informations nouvelles dans le but de réaliser une tâche liée à sa profession.
En quoi cette condition est-elle fondamentale?
Apprendre entraîne comme conséquence un ou des changements, donc la gestion du processus d’apprentissage s’apparente en certains points à celui de la gestion du changement. Un individu ne change que dans la mesure où il adhère aux objectifs du ou des changements proposés. S’il n’y a pas adhésion, il n’y aura pas de changement, par conséquent, pas d’apprentissage. La qualité première d’un apprenant sera donc son ouverture au changement et à la nouveauté. Cette ouverture lui permettra de passer d’un état premier à un autre plus évolué, moyennant une certaine quantité d’effort pour y accéder. Vu sous cet angle, les pires obstacles à l’apprentissage ou au changement s’avèrent être les croyances de l’individu. Plus l’apprenant est conditionné par ses croyances, plus il s’opposera à des pratiques ou des façons d’être qui pourraient entrer en conflit avec ce qu’il croit.
Qu’implique cette condition chez les apprenants?
Accepter de se lâcher ou de se laisser aller nécessite d’accepter de vivre une période plus ou moins longue d’incertitude, d’inconfort ou de malaise. S’ouvrir à quelque chose de nouveau que l’on ne maîtrise pas encore exige de remettre en question nos bonnes vieilles connaissances ou nos bonnes vieilles croyances. S’appuyer sur son vieux bagage de connaissances sans le remettre en question est sécurisant et permet de se conforter sans trop d’effort. Par conséquent, s’ouvrir à la nouveauté implique que l’on ait suffisamment confiance en ses propres ressources pour vivre un certain temps dans l’incertitude du résultat possible. Accepter de se laisser aller, de lâcher prise, de laisser de côté ses vieux modèles pour errer un certain temps dans l’incertitude, implique que l’apprenant a pu percevoir l’avantage et / ou l’intérêt pour lui du changement proposé et ainsi anticiper de façon positive les efforts qu’il devra fournir pour y arriver.
Que fait l’enseignant pour favoriser un laisser aller chez l’apprenant?
Amener l’apprenant à accepter de se laisser aller, de lâcher prise, c’est-à-dire, de s’engager et de s’invertir dans une démarche de changement nécessite avant tout de le sécuriser. Par conséquent, les tâches proposées par l’enseignant devront être élaborées afin de donner du sens et de la pertinence à l’apprenant. Ces tâches devront être accompagnées de consignes et d’informations qui placeront l’apprenant en confiance. Avec des consignes et des informations claires liées à une tâche qui a du sens et de la pertinence, ce dernier sera en mesure de se laisser aller.
(Technigogie, Volume 1, numéro 3 – mars 2008)